Billet d'humeur du 03/02/2024
Depuis quelques années, le thème des agressions et des crimes sexuels fait grand bruit, mais je m'interroge aujourd'hui plus particulièrement sur le vocabulaire employé lorsqu'il s'agit de libérer la parole au sujet de l'inceste.
Je me souviens d'un titre : "Inceste - La fin d'un tabou", repris en une d'un numéro de l'Obs en janvier 2021.
Voilà un titre très mal choisi à mon sens.
En effet, on parle communément de "briser le tabou de l'inceste". Mais quel est le sens de cette expression ?
Le tabou de l'inceste est la norme sociale qui rejette les pratiques sexuelles entre individus de même parenté, et qui aboutit à la prohibition de l'inceste dans la plupart des sociétés occidentales. Les fondements de ce tabou sont un sujet de réflexion et d'étude en sciences humaines, depuis que Sigmund Freud, puis surtout Claude Lévi-Strauss ont fait de l'interdit de l'inceste un préalable nécessaire à la structuration des sociétés humaines.
Donc, d'après ce titre, l'inceste ne serait-il plus un tabou ?
Bien entendu, ce titre choc veut parler du silence autour de l'inceste, et du tabou de la parole à ce sujet.
Mais tout de même, un peu d'attention aux mots n'est pas inutile.
Il y a, je pense, une confusion entre tabou et silence. Elle tient aux définitions qui sont données à ces deux termes. Dans le langage courant "tabou" désigne ce dont on ne doit pas parler, par crainte ou par pudeur. Mais à l'origine ce mot est issu de la langue des peuples d'Océanie, "tapu" en polynésien. Il désigne ce que les profanes ne peuvent toucher sans commettre un sacrilège. C'est un acte frappé d'interdit par un caractère sacré ou impur déterminé par une tradition magico-religieuse de ces peuples.
Il me semble au final que l'inceste constitue un crime sexuel qui s'inscrit dans cette dernière définition, il est donc primordial qu'il reste un tabou et que la parole se libère lorsque la transgression de ce tabou se produit.
NB. Tout ce que je partage sur ce blog s'appuie sur la recherche de ressources documentées. Toutefois, la manière dont je m'appuie sur ces ressources et les perçois n'est que mon point de vue et ne constitue en aucun cas une vérité absolue.
Effectivement, ce titre est assez choquant. Surtout qu'il y a certainement au moins une personne pour valider un titre, étrange.